Même si depuis quelques temps certaines structures culturelles ont pu rouvrir leurs portes avec des mesures contraignantes d’accueil, le monde culturel est encore durement touché par la crise sanitaire. Cinémas, musées ouverts de nouveau mais qu’en est-il des petites salles de spectacles, des centres culturels ? Nous sommes partis à la rencontre du régisseur du ROx, centre culturel et sportif d’Harnoncourt (Rouvroy)
On le sait, la crise sanitaire que nous avons connu dernièrement laissera des traces dans nombre de secteurs. Certains domaines ont eu le feu vert, synonyme d’une timide reprise de leurs activités mais bien encadrées par les mesures sanitaires. Au contraire, d’autres milieux sont toujours à l’arrêt, dans l’expectative, en attente des directives de reprise.
Parmi ceux-ci notons l’événementiel mais aussi le secteur culturel, l’un pouvant faire partie de l’autre. Et c’est dans ce cadre que nous désirions partir à la rencontre des acteurs de terrain, notamment de plus petites structures comme l’est le ROx de Rouvroy. Rencontre avec son régisseur, depuis trois ans, mais qui compte plus de 35 années dans le métier.
Bonjour, vous êtes le régisseur de ce centre culturel et sportif depuis sa création. En quoi consiste votre métier ?
Je suis effectivement le régisseur général du ROx à Rouvroy depuis trois ans. Je gère ainsi le personnel, l’administration, la comptabilité et la partie technique de l’infrastructure mais aussi la partie “gestion des stocks” des consommables et des bars.
Tout le bâtiment est géré en domotique, j’en assure donc la programmation et la maintenance, ou l’organisation de la maintenance notamment pour le chauffage, les contrôles d’accès et les différentes alarmes.
Du côté technique, j’analyse les demandes des artistes qui se produisent chez nous et je mets ainsi notre matériel à leur disposition. Pour les événements pour lesquels il n’y a pas d’équipe technique extérieure, j’assure le montage et le démontage du matériel ainsi que le son et/ou la lumière pendant les spectacles.
Je fais ce métier depuis 1984 mais en activité complémentaire jusqu’alors. C’est seulement depuis mon arrivée au ROx que c’est devenu mon activité unique. J’apprécie particulièrement la diversité de mes fonctions et surtout la partie relationnelle et la possibilité de participer à la création artistique.
A votre niveau, quel impact a eu la crise sanitaire sur votre métier au quotidien ?
Le Covid a mis à l’arrêt complet du jour au lendemain toutes les activités du ROx, tant au
niveau sportif qu’au niveau culturel. Dans l’incertitude totale nous avons reporté ce qui pouvait l’être et annulé ce qui ne pouvait pas être reporté. Une fois cette phase terminée, le personnel s’est retrouvé en chômage pour cas de force majeure.
Mars, Avril, Mai, Juin sont les mois les plus denses pour nos activités et aussi les mois les plus rentables. Nous avons un statut spécial et hybride de fonctionnement en régie communale autonome, ce qui nous ferme toutes les portes de subvention et d’aides possibles car la Fédération Wallonie Bruxelles n’aide que les structures qu’elle subsidie déjà.
Nous sommes tenus au maximum à l’équilibre financier sur nos activités propres avec une subsidiation communale complexe et budgétée 18 mois à l’avance ! Autant dire que nos liquidités financières sont mises à mal, malgré le report des cotisations sociales et le recours au chômage Covid. Et tous les clubs utilisateurs du ROx sportifs et culturels sont en souffrance pour les mêmes raisons.
Comment se trouve le secteur de la culture actuellement ?
Dans une situation dramatique, beaucoup d’acteurs directs et indirects ne vont pas se relever ! Les aides de l’état, pour ceux qui y ont droit et c’est loin d’être la majorité des cas, sont à peine une bouffée d’oxygène.
Dans un ménage, la culture et les loisirs sont toujours les secteurs que l’on sacrifie quand on doit se serrer la ceinture. Dans la société en général, c’est pareil. D’autant plus que le secteur est rarement pris au sérieux : « Ah, tu es artiste ? Et sinon tu fais
quoi comme vrai métier ? »
« Ah, tu es artiste ? Et sinon tu fais quoi comme vrai métier ? »
Vous sentez-vous écouté et entendu par nos politiques ? Qu’attendez-vous de nos décideurs ?
Les politiques ont une certaine logique cohérente non seulement dans leur écoute mais aussi dans leurs réponses aux problèmes auxquels ils sont confrontés. Cette logique est fondée sur leur propre conception des priorités sociétales, qui diffère fortement d’un parti à l’autre. Quelle que soit leur « pyramide de Maslow », si vous me permettez cette analogie, la culture et les loisirs, comme déjà dit plus haut, sont au bas de l’échelle. Donc on est peut-être écouté et entendu mais d’une oreille distraite, au mieux.
J’espère que cette crise va inciter les politiques à se remettre en question, à faire une
évaluation honnête de leur gestion, des causes réelles des manquements. Ils doivent faire
amende honorable pour regagner la confiance des citoyens et remettre l’humain au centre de tous les débats. Cela passe par une négation forte de la mondialisation et de toutes ses
conséquences économiques, sociales et environnementales.
Au quotidien, comment pourra faire votre structure ROx pour maintenir le bateau à flots ?
Il n’y a pas 36 solutions ! Il faut gérer en bon père de famille, en l’occurrence : diminuer les dépenses et augmenter les recettes. Cela veut dire plus aucun investissement dans les deux ans à venir, une réduction maximale de tous les frais fixes, une négociation encore accrue sur les coûts des spectacles; d’une part. Et d’autre part, une augmentation inévitable de tous nos tarifs, dans une mesure raisonnable pour ne pas impacter trop les utilisateurs de nos structures.
Nous sommes une structure toute jeune, on commençait à peine à être connue. On redémarre à zéro …
Comment voyez-vous le futur du secteur de la culture dans de petites structures telles que la vôtre ?
Je pense qu’il va falloir encore beaucoup plus se reposer sur le tissu local et favoriser les
artistes régionaux et les productions plus raisonnables en terme d’exigences financières et
techniques. Il va falloir être imaginatif et inventif pour proposer des choses nouvelles et originales pour continuer à intéresser le plus grand nombre.