C’est grâce à son métier d’artisan couvreur zingueur qu’Eric Legrand a découvert la dinanderie. Tombant nez à nez avec les girouettes ou les coqs des églises lors de ses travaux en hauteur, l’idée germe rapidement : apprendre cet artisanat très spécifique afin de pouvoir créer à son tour des oeuvres d’art faites de cuivre ou de laiton.
C’est dans son atelier situé à Bras-Haut (Libramont) que nous rencontrons Eric Legrand. Casquette bien vissée sur la tête, mains usées par les multiples manipulations que demande cet artisanat, Eric est un véritable passionné.
D’abord indépendant ardoisier-couvreur, c’est en montant sur les toits qu’il a découvert la dinanderie. “Je me suis tourné vers la dinanderie dans l’objectif de refaire des girouettes et des coqs d’églises. C’est en allant au cours à Dinant que j’ai découvert qu’on pouvait façonner le zinc, le cuivre et le laiton de différentes manières” nous dit-il d’entrée de jeu.
La dinanderie : un art connu dans le monde entier
L’art que maîtrise Éric est tout à fait spécifique. La dinanderie est connue dans le monde entier et c’est dans la ville de Dinant, en Belgique, que cet artisanat à vu le jour au Moyen-Âge.
À l’époque, les matières premières, comme le minerai de fer, arrivaient le long de la Meuse par voie fluviale. La présence de combustibles ainsi que l’énergie hydraulique ont fait de la vallée mosane le berceau de cet artisanat en voie de disparition.
“D’un côté de la Meuse on trouvait les chaudronniers, ceux qui faisaient les marmites en cuivre, les casseroles, etc. C’est grâce à un évêque demandant à certains de se spécialiser dans la décoration d’église que la dinanderie telle que je la pratique a vu le jour” nous explique Eric.
C’est en martelant sans arrêt une feuille de cuivre ou de laiton, où chaque impact a son importance, où chaque angle donné par les coups de marteau est calculé, que l’art de la dinanderie prend toute sa splendeur.
Des études de mécanicien, le métier de couvreur et la passion de la dinanderie
Eric ne connaissait pas la dinanderie avant d’en apprendre les rouages. Lorsqu’il était encore étudiant, le libramontois avait choisi d’apprendre la mécanique automobile. Il nous avoue que c’est déjà le contact avec le metal qu’il appréciait à l’époque. Puis ensuite, c’est sur les toits qu’Eric se retrouve.
“J’ai eu la chance de travailler comme ardoisier pour des chantiers dans le cadre de la sauvegarde du patrimoine où j’ai fait de belles réalisations en ardoise. C’est à ce moment que j’ai vu de superbes coqs sur les toits et je me suis dit que j’allais essayer de les reproduire. Depuis je n’ai plus lâché !” nous confie Eric.
Aujourd’hui, voulant encore se perfectionner dans cet artisanat en voie de disparition, que ce soit en décoration intérieure où pour des décorations de toiture, Eric Legrand prend des cours tous les mardis dans la ville qui a vu naître la discipline.
Un atelier où trônent ses plus belles réalisations
Comme pour beaucoup de disciplines artistiques, la dinanderie demande de la patience et du travail. Ce sont des gestes que l’on apprend en travaillant, souvent seul car les secrets du métiers meurent avec ceux qui les connaissent. En d’autres mots, comme nous avoue l’artisan. “Une personne qui prend sa pension, refusera de donner ses trucs la plupart du temps.”
C’est au sein même de son atelier que sont accrochées, posées, disposées bon nombre de ses réalisations. C’est un écusson qui attire rapidement notre regard : celui de l’étiquette de la bière d’Orval. Pour cette pièce, c’est plus d’une centaine d’heures de travail qu’il a fallu à l’artisan pour la façonner.
Pour d’autres réalisations, comme ces bolets dorés qui trônent dans un coin, c’est près de 60 heures de travail qu’il aura fallu compter. “Ce sont souvent des opérations répétitives comme chauffer, refroidir, nettoyer les pièces. C’est cela qui prend du temps.”
“Ce que j’aime c’est de travailler la matière et de donner vie à ce que j’ai imaginé. Au niveau création je suis vraiment libre. Les clients peuvent donc venir me voir avec leur demande et leurs idées et on voit ensemble la faisabilité de leur projet.”
C’est d’ailleurs comme ça qu’un restaurateur bruxellois a demandé à Eric de fabriquer une quarantaine de cendriers en laiton il y a quelques temps. Ou plus récemment, une demande d’une confrérie gantoise afin de fabriquer une médaille ne trouvant aucun autre artisan assez qualifié pour le faire. Et comme nous le dit Eric, c’est grâce à ces demandes “que nous pouvons prouver que notre métier est encore utile.”